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Blog collectif du Centre de Soins des addictions, destiné à informer, et à recevoir les contributions des patients du C.S.A.P.A du Pays-Haut, mais aussi des membres de leur famille, de leur couple, des amis...

mardi 21 décembre 2010

Histoire de l'alcool

Transmis par le Docteur Guiliani ( médecin alcoologue nutritionniste consultant à Mont Saint Martin):

HISTOIRE DE L’ ALCOOL


Première Partie : « L’archéologie de l’Alcool »

Le Christianisme
L’Ancien Testament évoque fréquemment l’usage du vin.
Le premier vigneron reste Noé qui planta la vigne dès la fin du déluge (il avait 600 ans) et en action de grâce, l’arrosa du sang d’un agneau, d’un lion, d’un singe et enfin d’un porc (on reconnaît là les effets du vin selon que l’on en boit peu, beaucoup ou trop). Il connut l’ivresse et l’humiliation de s’être mis nu devant ses fils, la dérision d’un des leurs et l’action des deux autres qui le couvrirent d’un manteau en marchant à reculons. L’ivresse seule est source d’humiliation et non pas l’homme (Noé mourut à …950 ans).

Loth est également un symbole de la différence entre l’ivresse et la dignité humaine. Lorsque Sodome fut détruite, aucune possibilité de descendance humaine ne pouvait exister, les survivants étant Loth et ses filles. Celles-ci l’enivrèrent et obtinrent de lui une descendance. Loth, grâce à l’ivresse n’eut conscience « ni de son coucher ni de son lever » (Genèse), donc fut épargné de la culpabilité de l’inceste.
Ainsi la race humaine put se perpétuer dans la moralité divine.
Le Nouveau Testament apporte une autre image du vin. Entre le premier miracle de Jésus Christ aux Noces de Cana transformant l’eau en vin et son dernier repas où le vin devient le sang du Christ, la religion chrétienne a permis le passage du vin païen au vin chrétien.

L’expansion de l’empire romain et la propagation de la chrétienté étendront la culture de la vigne. Cette culture, en France, dirigée par les romains, faite par les gaulois (esclaves) eut au fil des siècles pour mainteneurs les abbés, évêques et princes du moyen-âge.

Le Moyen-Age
Au nom de la gloire de Dieu, une viticulture monastique s’épanouit, les « Pères » brasseurs de bière faisant de même. L’ivresse toujours réprimée, devient un pêché.
Le marché du vin s’accompagne de charges, impôts et privilèges tantôt promulgués, tantôt abolis.
Dans cette époque, le monde paysan et citadin boit du vin tant qu’il n’est pas devenu vinaigre.

La Renaissance
Cette époque marque l’essor du vin-plaisir, donc d’une boisson de qualité. La naissance des grands crus aura lieu pendant les XVII et XVIIIème siècles.
La fiscalisation par « l’octroi » amène la réglementation des guinguettes, tavernes et cabarets avec heure de fermeture obligatoire, amendes pour les débitants et usagers.
Ces cabarets « parlements du peuple » comme aimera dire Balzac bien plus tard, amènent à la Révolution Française et à un éphémère « vin de la liberté » défiscalisé…le temps d’une révolution….


Cette première partie de l’histoire de l’alcool que l’on peut appeler « l’archéologie de l’alcool » reste très actuelle entre l’usage réglementé protégé, glorifié, sacré de l’hydromel au vin à la bière et aux autres boissons fermentées.
Peu de place a été donnée aux boissons distillées (alambic) d’origine arabe pour les uns, grecque pour les autres.
Concernant l’origine arabe, « al-kuhl » désignait d’abord l’antimoine pulvérisé (car on le mêlait jadis à d’autres métaux afin qu’il contribue à les durcir), ensuite tout liquide distillé. Un tel emprunt a été réalisé par d’autres alchimistes dont l’art de la magie associait des techniques chimiques (remontant à la découverte et à la maîtrise des métaux) avec des spéculations plus ou moins mystiques (ou secrètes)… ; « el khôl » signifie également en arabe : masque.
Cette « eau de vie », cet esprit du vin, fabriqué par les distillateurs et vendue uniquement aux apothicaires, sera le support élixir de teintures et autres remèdes dans le XVIII siècle.
Le mot alcool vient de naître et c’est une autre histoire développée dans la deuxième partie.
Pour l’heure qu’en retenir :
  1. C’est le hasard d’une fermentation qui est à l’origine de la découverte de l’alcool.
  2. La découverte est située au néolithique (époque dite de la pierre polie ≈ 5000 ans avant JC)
  3. La Grèce et la Rome antique célèbrent le culte de Dionysos pour les grecs et Bacchus pour les romains
  4. L’ancien testament cite les grandes ivresses de Noé et de Loth en donnant une notion morale
  5. Le nouveau testament insère le vin dans la vie sociale
  6. Le moyen-âge voit la naissance des grandes réglementations de la consommation et du négoce du vin
  7. La renaissance signe la qualité et la naissance des grands crus
  8. Les boissons issues de distillation n’ont que peu de place dans l’histoire « archéologique » de l’alcool.




Deuxième Partie : histoire de l’alcool 
aux temps modernes

De quoi ça parle ?
Cet historique de la période moderne abordera les changements de comportements sociaux et l’apparition de la notion de maladie alcoolique qui préoccupera la « santé publique ». Cette préoccupation prendra 2 directions :
  1. La Prévention par la création d’une législation spécifique répressive et préventive et d’associations de prévention
  2. Les Soins partagés entre les prises en charges médicales soutenues par la recherche et les prises en charges associatives.

Si l’archéologie de l’alcool a montré que l’usage réglementé, protégé, sacralisé reste encore actuel, l’histoire des temps modernes mettra en forme « sociale » ce que les anciens avaient repéré et traduit en usage « humain ».
La fin du XVIIIème siècle, le début de la révolution industrielle s’accompagne de changements démographiques et de comportement social en Europe. Un historien britannique Théodore Zeldin écrit que le peuple français « acquiert tout d’un coup en même temps, le droit de vote et le droit de boire ».
Les méfaits d’une consommation excessive sont décrits par Dickens pendant qu’un médecin suédois Magnus Hus propose le terme d’alcoolisme en décrivant les multiples alcoolopathies viscérales ou mentales. La traduction française sera publiée en 1852.
Ainsi sont rattachés à une molécule, l’alcool, décrite par les chimistes, les effets néfastes de nombreuses boissons alcooliques. Toutefois, en 1865, Pasteur, ne trouvant pas de germes nuisibles dans le vin déclare que « le vin est la plus saine et la plus hygiénique des boissons ».
Il est bon de rappeler que seules les boissons distillées étaient mises en cause, au point qu’un médecin affirmait en 1877 que « l’alcoolisme ne se rencontre que dans les départements qui ne consomment pas de vin » !!!
Parallèlement à la publication des scientifiques et des romanciers tels que Dickens et Zola sur l’alcoolisme, les premières sociétés de tempérance se constituent en mouvement d’aide tels que la CROIX BLEUE en 1877 à Genève, d’obédience protestante et la CROIX D’OR en 1910 d’obédience catholique. Les premiers sevrages se feront à l’aide de ces associations.
Après sa création la LIGUE NATIONALE CONTRE L’ALCOOLISME compta jusqu’à 150.000 adhérents en 1912.

La guerre de 14/18.
L’utilisation des quarts de « gnole » durant la guerre suivie dès la fin de celle-ci par « l’union sacrée » autour du « pinart de la victoire » réussira à faire passer la consommation de vin par habitant en France de 160 à 172 litres par an (moyenne de 1930 à 1939) contre 60 litres en 1997, cette alcoolisation est essentiellement masculine, des tas de jeunes conscrits ayant découvert pendant ce dramatique épisode toutes les particularités du produit qui donnait du courage, qui permettait de soigner sa détresse et ses pleurs etc…Paradoxalement, la consommation d’absinthe fut interdite en …1915.

L’entre-deux guerres
La fin de la première guerre mondiale va marquer un temps de surproduction du vignoble français, donc d’une augmentation de la consommation par habitant citée plus haut.
Les lois répressives s’intéressent à l’ivresse publique, toujours considérée comme un désordre social et situent la majorité alcoolique à 18 ans.
En janvier 1920 les Etats-Unis inventent la prohibition pendant qu’en France les associations anti-alcooliques ne seront plus soutenues par l’Etat, ni moralement, ni financièrement.
La victoire de 1918 a amené une expansion nationale « obligée ».

L’après-guerre
Le monde médical demeurera jusqu’aux années 1950 assez impuissant devant le phénomène de la dépendance alcoolique et des alcoolopathies.
L’apport des vitamines, la découverte de médicaments psychotropes, hypnotiques, tranquillisants, aidera les médecins.
Les méthodes de dégoût ou de dissuasion apparaissent, la méthode Champeau des piqûres chauffantes est proposée en 1965.
Les années 1970 voient la création des Consultations d’Hygiène Alimentaire devenant Centre d’Hygiène Alimentaire en 1975 pour s’appeler Centre d’hygiène Alimentaire et d’Alcoologie (CHAA) en 1983 qui se transformeront enfin en Centre de Cure Ambulatoire en Alcoologie (CCAA) en 1999.

La Ligue Nationale contre l’Alcoolisme deviendra Comité de Prévention contre l’Alcoolisme pour se nommer depuis l’Association de Prévention contre l’Alcoolisme dont l’objectif essentiel est la prévention et l’application de la législation et non l’aide aux soins.
Le monde associatif avec la Croix Bleue et la Croix d’Or crée des Centres de cure et postcure.
Il se laïcise avec la création de Vie Libre en 1953, proche du milieu du travail et des mouvements d’Education Populaire. L’aide à la réinsertion professionnelle devient un de leurs principaux objectifs.
Les Alcooliques Anonymes est une association issue de la rencontre en 1935 de deux buveurs américains (Bill et Bob) qui sont ainsi devenus abstinents. Ceux-ci éditent un livre en 1939 « les Alcooliques Anonymes », appelé le Gros Livre, surnommé Big Book, dans lequel ils développent l’idée de maladie comportementale caractérisée par une perte de contrôle des consommations et dont le seul traitement est l’abstinence absolue (sobriété), renouvelée de 24H en 24H.
Ce traitement n’est selon eux possible qu’avec le partage de l’expérience de chacun mise en commun. Le centre d’intérêt sera une réflexion commune et comportementale sur le « comment » on boit, « comment » on s’arrête et non sur le « pourquoi » je bois.
Ce mouvement sera introduit en France en 1960.
Il existe également des mouvements associatifs professionnels issus des grandes entreprises publiques ou privées.
En 1990 une définition de l’ « Addiction » est proposée par Goodman : « processus par lequel un comportement, pouvant permettre à la fois une production de plaisir et d’écarter ou d’atténuer une sensation de malaise interne, et qui se caractérise par l’échec répété de contrôler ce comportement et sa poursuite en dépit de la connaissance de ses conséquences négatives ».
Ce concept d’addiction amène au terme de "pratiques addictives", comprenant de multiples facettes, dont celle de la dépendance alcoolique.
Mais ceci est une autre histoire, celle qui reste à écrire dans l’entrée de ce Millénaire.
Pour l’heure, qu’en retenir ?
  1. La fin du XVIIIème siècle avec la Révolution Française marque des changements de comportements sociaux.
  2. Le terme alcoolisme apparaît au milieu du XIXème siècle
  3. La fin du XIXème et le début du XXème siècle seront marqués par la création d’associations de soutien aux malades alcooliques et de prévention contre l’alcoolisme
  4. Après les années 1950 une véritable stratégie de soins sur le plan médical se met en place.
  5. A l’aube des années 2000 un nouveau concept laisse augurer de nouvelles stratégies : l’ADDICTION….




    lien réduction des risques :  http://www.technoplus.org/t,1/1018/t
     sur la route : http://www.technoplus.org/t,1/1055/securite-routiere

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